samedi 16 mars 2013

Le premier jour de ma vie.




C’est l’été. Et c’est le premier jour de ma vie.

 Une quinzaine de nuits claires, durant lesquelles on pouvait voir la lune au travers des fenêtres de la cuisine se sont écoulées. Maman est plus sereine désormais. Depuis que nous sommes autonomes, elle reprend du « poil de la bête ». Nourrir sept chiots n’a pas été mission facile et Maman qui de nature, n’était déjà pas bien grosse a fondu à tel point que je me suis inquiété pour sa santé. Mais désormais, c’est terminé. Elle vit toujours dans la maison avec nous et  Ma’tante. Nous ne venons  plus vers elle que pour les câlins et si par hasard l’un des plus nigauds d’entre  nous voulait encore téter.  Elle l’envoie paître et c’est bien ainsi ! Car nous devons devenir des chiens autonomes et forts. Mais pour les moments tendres, elle est toujours là.

Ce jour est « le grand jour » et nous avons tous le cœur serré, car c’est celui des adoptions. Celui où nous quittons Maman, Ma’tante, le berger et sa maison. Maman est heureuse pour nous tous et je le crois, un peu plus pour moi encore. Parce que j’étais le dernier et que souvent le dernier est le « plus mal placé ». Plusieurs fois ces derniers jours, elle m’a rassurée me disant que j’avais de la chance et que même si j’étais le dernier adopté, je n’étais surement pas  le plus mal placé. Mais que pourrait dire d’autre une gentille maman à un de ses chiots inquiets ? Moi j’aimerai simplement  ne jamais  devoir quitter maman…

Il est convenu que les « maîtres », ne viendront nous chercher qu’à partir de dix heures trente. Il est dix heures et  quelques et nous avons encore le temps devant nous. C’est d’ailleurs le moment du repas du matin, du lait de chèvre et du pain. Mais je n’ai pas grand appétit. C’est l’été et c’est le matin. Le temps est doux. Au travers des fenêtres, le soleil baigne déjà la petite cuisine de ses rayons. L’air est chaud dans la maisonnette, mais la tommette reste fraîche sous les pattes.  Le berger frotte sec le sol du salonn car comme chaque jour, la maison embaume l’odeur des cacas et des pipis. Nous avons encore le temps, mais pourtant on frappe déjà à la porte… Mon cœur se sert, car le premier de ma fratrie va s’en doute s’en aller et rejoindre sa « nouvelle famille ». Cela me chagrine de penser qu’en tant que dernier, je vais les voir partir les uns après les autres avant que ce soit mon tour. Je vais surtout voir les yeux tristes de Maman. Je crains que ce ne soit une bien difficile journée pour elle. 
La porte s’ouvre et la pénombre se fait. Ma petite sœur noir et blanche me chuchote à l’oreille :

 «  C’est pour toi… »

Elle se trompe, ce n’est pas possible, car moi je suis le dernier ! La pénombre n’est qu’un effet d’optique !  Renifle et  tu sentiras un doux parfum fleuri ! Écoute et tu entendras une voix féminine qui appellera son « bébé! » ou « son loup! ». Mais çà sent le cuir et personne n’appelle…En vrai, c’est lui. C’est mon bipède à moi.

Il est bien en avance, il s’en excuse auprès du berger. Je croise le regard de Maman et je voudrais que cet instant ne finisse jamais. C’est terriblement dur de savoir que tout se termine et qu’on doit malgré nous, partir. C’est difficile de prendre conscience que le présent n’est plus et que désormais, il faudra compter avec un passé. Moi, je ne veux pas que mon présent devienne le passé. Je ne veux pas que les choses changent… Le bipède discute de nouveau avec le berger. Le berger est inquiet, Maman l’est aussi et même Ma’tante soupire. Moi et la fratrie, nous sommes à la limite du salon et de la cuisine. Personne n’ose franchir le pas, surtout pas moi…Le berger vient vers nous. Il vient vers moi. J’aurais envie de fuir de traverser la fenêtre par laquelle le soleil nous réchauffe chaque jour. De retrouver Papa, afin qu’il me protège. Mais je reste là. Il me cueille et me remet dans les bras « du maître ». J’ai peur et je suis triste. Même si le contact est aussi  tendre que la première fois et que son cœur d’humain bat aussi vite que le mien. 
J'entends ma petite soeur noire et blanche: "Bonne chance à toi,  frère! "

Il m’amène à Maman. Elle est triste et heureuse à la fois et cela me rassure un peu. Elle et moi nous nous disons des choses qui ne concernent que nous et que je ne vous livrerais pas ici. Sachez juste qu’elle me dit qu’elle m’aime, que le fait que mon maître soit le premier à venir me chercher est un bon signe. Qu’elle me souhaite tout le bonheur du monde et qu’elle me demande de ne pas l’oublier.

Le bipède qui sent le cuir me reprend dans ses bras et nous quittons la maisonnette du berger. Dehors, le soleil brille et ça m’agresse un peu les yeux. Nous traversons la rue. Je suis moi, dans ses bras. En regardant en arrière, je vois que la façade de la maison est peinte de jolis moutons. Cela me confirme que je suis né dans une vraie bergerie. Mais là, j’ai le cœur gros… Il ouvre la porte d’une petite automobile et il m’installe dans un carton ! Je reconnais qu’au fond  de celui-ci,  il y a cependant un bon cousin. J’y découvre deux objets énigmatiques. Un os en plastique et ma première balle !  

Le berger n’a pas envie de me voir partir, je le sens bien et il fait en sorte de retarder l’instant.  Il dit qu’il aimerait avoir des nouvelles. Le bipède répond qu’il en donnera. Mais c’est  déjà trop tard pour faire demi tour. Mon avenir est désormais tracé. 
Alors, je grimpe dans cette voiture. Je le regarde, il me regarde. Il a un bon sourire, lorsqu'il me dit:
"Bienvenue Clyde, je t'attendais depuis si longtemps".


2 commentaires:

  1. Adorable bébé chien :)

    salutations au Clan

    Morgwen

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  2. Une tendre et chaleureuse rencontre pour les deux. Que votre amitié se prolonge...des aurores et des aurores encore! E'Clyde, de l'adorable chiot au chien mature, tu es un chic...type! (rire). B

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