lundi 23 décembre 2013

Les funérailles de Senocingetos.



Bien entendu, il m’était souvent déjà arrivé de participer à des obsèques. Celles de mon propre père, celles de voisins, celles de gens communs. Cependant ce fut la première fois où j’assistais à celles d’une légende.
Ce jour était le  dixième jour clair du mois de Dumann, année 1830 de l’ère de la bataille des tertres. C’était aussi la nuit la plus longue de l’année.
Senocingétos, le « vieux guerrier »  s’en était allé  depuis plusieurs semaines et  tous ceux qui comptaient importance à cent lieues  à la ronde  au nord de Sequana, venaient ou diligentaient chez nous des ambassades. Car demain serait le jour où Senocingétos prendrait son envol.
Notre village  semblait alors être devenu le  centre du monde.
Je ne puis vous dire ce qui a pu se dire, cette nuit là dans la maison des illustres invités. Car je n’y avais  bien entendu, pas ma place.  Cependant, j’étais dans celles « des suivants ». Servant modeste de mon clan, je côtoyais les plus fiers Ambactos de la Gaule Belgique. Outre ceux de nos frères Ambiens et Morins, il y avait là, ceux de Corré le Bellovaque, de Galba le Suession, de Boduognat le Nervien. Il y avait même ceux d’Andecumbor le Rème, lequel était venu en personne et ce, bien que ses amitiés avec Rome, rendaient nos relations  quelque peu orageuses…
Il y avait aussi et surtout le frère de lait de Commios Ad-Tréba-Ti. Celui qui venait du clan voisin et ami, (de l’autre côté de la colline).
                               
Tambours et flûtes jouent tout doucement…
Au coin du feu, un membre de la soldatesque, au visage traversé d’une énorme cicatrice, chante d’une voix douce et tremblante :
 -« Senocingétos s’en va vers les îles divines… Il marche sans peur, car son âme est éternelle. Fier et droit, il attend le passeur et sa barque sombre. Il me tarde de suivre le chemin de Senocingétos… »
Les autres sont là, les jambes croisées comme le Dieu Kernunnos.  Ces paillards, féroces guerriers sur les champs de bataille, l’écoutent  sagement comme le feraient de petits enfants... Leurs visages sont fermés et leurs yeux embués.
Un vieux  dit alors :
-« Haut les cœurs, mes frères ! Senocingétos  est  heureux, il nous quitte après une longue vie et il a sa place aux îles de l’ouest, en compagnie des Dieux, des héros et des meilleurs parmi nos pères.   »
Un autre, (il est tout jeune)  demande :
- « Es tu sûr de cela ? Il n’est pourtant pas mort au combat? »
Un  autre, colérique rétorque :
-« Senocingétos fut de tous nos combats. Il combattait déjà pour nos gloires, au temps où le père de mon père n’était encore qu'un enfant !»
Un sage explique:
-« Senocingétos était déjà un homme mûr, lorsque avec les nôtres il marcha vers l’est au devant des Cimbres et les Teutons qui profanaient les terres sacrées des Belges.  Il fut de ceux qui les  mirent en fuite en exposant son torse sans cuirasse et en crachant sa juste colère, comme  le soufflet de cuir attise les flammes de la forge. »
Le frère de lait de Commios dit :
-« Quel barde n’aurait pas à cœur d’entonner pour lui des chants élogieux? Toi, Labros, qu’en penses tu?»
Labros répond :
-« Chanter la gloire de Senocingétos serait  pour moi un honneur et un privilège. Ma seule peur serait de ne point  en être digne. Mais vous, vous lui rendez bien plus bel hommage que ne le feront les puissants de la maison d’à côté.  Senocingétos était l’un des vôtres… »
Alors le premier reprend:
-« Senocingétos sa vie durant a honoré les Dieux que prient nos tribus. Il n’a pas fait le mal et bien des gens avant nous, ont vanté sa bravoure.
Aussi, je ne  doute pas un instant que Senocingétos quittera demain le cycle des renaissances.
C’est pourquoi, je vous le dis : Senocingétos est heureux et chanceux !»

mercredi 11 décembre 2013

AdloBilio & Marusa LauaLaros, Lexsouia (Le bel arbre & la petite poule boiteuse morte.)

Hier, c'était le quatorzième jour de la lunaison sombre de miđ Samon, de l'année 3886 de l’ère de la bataille de la Plaine des Tertres. Ce fût à la fois une journée gaie, mais aussi bien triste.

Le début de l'après midi fût triste, car  Maitre Clyde et moi alors que nous allions  nourrir la volaille, avons découvert Lexsouia, (la  boiteuse) morte dans le bucher. Elle y était  installée depuis quelques jours, lorsque le maitre l'avait découverte malade au poulailler. Elle tenait compagnie à Commios l'Atrébate, l'exilé. 
Cela a été une grande tristesse de la retrouver toute raide couchée sur la mangeoire à grains. Maitre Clyde n'a rien dit, mais j'ai vu que cela l'avait affecté. 
Je crois  cependant que Commios l'est encore plus. La petite boiteuse était la dernière poulette "Gauloise cendrée". Désormais, il est le dernier de sa race... Il est seul  dans le bucher, depuis que les autres coqs ont tenté de lui faire la peau.




Néanmoins la journée fût  aussi gaie. Maitre Clyde a ramené un peu plus tard,  à la maison un petit  sapin... C'est une folie qui lui prend tous les ans, du moins depuis que je suis arrivé ici.
 C'est ainsi, quelques jours avant le jour le plus court et la nuit la plus longue de l'année, il ramène cet arbre à la maison et on le décore. 
Maitre Clyde l'appelle "sapin de Noël". 
Moi, j'ai beau n'être qu'un chien, j'ai bien compris qu'il y avait   là, une petite ambiguïté.  Nous, normalement, nous sommes des Gaulois, des Celtes!  C'est du moins ce qu'il nous explique tout le long de l'année.  Les Gaulois, j'en suis certain ne ramenaient pas de sapins dans leurs maisons...
Taquin, j'interroge à ce propos, maitre Clyde. Il répond:

-" Ce que tu me dis est vrai. Le sapin n'est peut être pas vraiment gaulois... Mais, une certaine nuit, il semble être  comme "nécessaire" pour attirer les cadeaux, les balles et les os à mâcher...
S'il n'y avait pas de sapin à la maison cette nuit là, il n'y aurait sans doute pas de cadeau pour toi, Einstein et Benca. Serais tu prêt à prendre ce risque?" 
...
...
...
C'est bon, je suis convaincu! Où sont donc rangées les décorations pour le rendre plus joli?





Ton ami à quatre pattes, E'Clyde TriCanauos 

vendredi 6 décembre 2013

GiamaNoxt (nuit d'hiver)

Nuitamment , c'est la naissance du onzième jour de la lunaison sombre de miđ Samon, de l'année 3886 de l’ère de la bataille de la Plaine des Tertres et je crois pouvoir dire qu'ici c'est pour de vrai la première nuit de notre hiver, car Maitre Clyde, a allumé les bougies. Il n'allume les bougies qu'au cœur de la saison froide, juste  les soirs où il ne travaille pas et reste avec nous. 
J'aime les bougies, j'aime regarder leurs petites flammes qui dansent dans la nuit. On dirait des fées.

Ce soir est une bien douce nuit. Le temps nous est propice et  le froid n'est pas encore vraiment au rendez-vous. Au coin du feu, il fait chaud sous les pattes!
Einstein  est à la cuisine. Il partage son panier avec Druuidos.
E'Clyde lui  est un peu chagrin, car le maitre lui a refusé une dernière partie de balle. Du coup, il s'est couché à mes côtés et il boude un peu. 
Son gros croupion est contre moi. Il me chauffe les fesses et je dois dire que cela n'est pas désagréable.
 Maitre Clyde écrit. Je ne sais pas trop  sur quoi... Peut être écrit il des histoires de Gaulois, peut être écrit sur nous et sur cet  instant finalement, sans grande importance. 
Qu'importe,  ce soir on est bien...

J'entends Einstein qui soupire de l'autre côté de la porte. Sans doute que Druuidos prend trop de place dans le panier.
E'Clyde ne fait plus son grognon, il est descendu du divan pour mendier une caresse et il l'a eu.
Maitre Clyde écrit toujours, il a un petit sourire au visage.
Moi j'ai fait mine de fermer les yeux, mais je  veille et j'observe mon clan.

C'est bon de vivre ici.

Ton amie à quatre pattes, Benca TriCanauos.